Sunday, May 26, 2013

le goût des autres... ça va!

Bonsoir à tous,


Scène tirée du film « Le goût des autres » (2000) d’Agnès Jaoui : http://www.youtube.com/watch?v=vl_AsEob5_M

En deux temps :

-          une dispute au bureau entre un « riche industriel mais d’origine sociale populaire » (Jean-Jacques Castella) et son « collaborateur d’origine sociale distinguée » (Weber).

-          un dénouement (du verbe « dénouer »= to untie) autour d’une demande/refus de démission.

Nous allons nous intéresser aux nombreux temps et modes verbaux employés et à leur fonction dans le dialogue.

TRANSCRIPTION :

Castella : [taciturne] ça va ?

Weber : [sec] ils sont partis ! Ils ont attendu jusqu’à dix-sept heures trente puis ils sont partis !

Castella : qui ça ? Ah oui, les iraniens, merde…

Weber : ben oui, les iraniens ! J’ai pris rendez-vous demain, à la même heure, mais là [il] faut y être hein ! Faut pas traiter les gens de cette façon.

Castella : ouais, ouais, ça va…

Weber : Mais non ! Non ça va pas ! ça fait plus d’un mois qu’on travaille sur ce contrat. Sans parler de ce contrat, de manière générale, vous êtes absent… même quand vous êtes là. On [ne] peut pas travailler dans ces conditions. On a l’impression que tout vous ennuie. Bon, à part l’anglais [où] vous avez progressé, ça c’est un fait. Mais franchement monsieur Castella, il faut que chacun prenne ses responsabilités. Je ne peux pas tout faire moi-même.

 

[Le collaborateur quitte la pièce. Pour Castella, petite pause de réflexion, puis il le rejoint]

Castella : Je commence à en avoir plein le cul de vos grands airs là. Faut arrêter de me parler comme ça hein ? C’est pas parce que vous arrivez de Paris avec vos diplômes, qu’il faut vous croire le roi du monde hein ? Ça va ! Je serai à l’heure demain, ça va ! [pause] Vous avez autre chose à me dire ?

Weber : [piteux] Non.

 

1’08-[Les deux hommes se séparent. Ellipse : on les revoit sortir du bâtiment.]

Weber : [tendant la main courtoisement] A lundi. Vous vous souvenez que c’est [à] dix heures précise ?

Castella : [dédaigneux] Vous inquiétez pas, je me souviens oui.

Weber : [prenant une lettre dans son cartable] oui voilà… je voulais vous donner ça, c’est ma lettre de démission.

Castella : [soudain inquiet] Ah bon ? Vous voulez partir ?

Weber : [aimable] Oui. Je crois sincèrement que je ne vous conviens pas. J’ai retourné le problème dans tous les sens et j’ai pas trouvé de solution. Et je crois malheureusement que la situation ne changera jamais, quels que soient les efforts que je pourrais faire.

Castella : [anxieux]

Weber : Vous m’avez jugé depuis le début parce que je ne fais pas partie de votre monde. Vous dites que je parle comme un ministre. C’est vrai, oui, « je parle comme un ministre ». C’est ma formation. On m’a éduqué comme ça. J’ai essayé de faire autrement, j’ai fait de mon mieux pour me faire accepter, pour vous plaire. Il faut bien se rendre à l’évidence, j’ai échoué. Voilà, donc euh je pense qu’il vaut mieux que je m’en aille. Bon. A lundi.

Castella : [le rappelant] Weber ! Weber ! [Sincère] Moi je veux pas que vous partiez. Vous voulez pas réfléchir un peu ?

Weber : J’ai réfléchi. C’est pour ça que je vous ai parlé. Parce que j’ai réfléchi.

Castella : Et ouais, mais c’est dommage, parce que… Enfin… je m’en rendais pas compte. Moi je croyais que c’était vous qui me méprisiez. Excusez-moi si je vous ai fait du mal. Je m’en rendais pas compte. Vous voulez pas y penser encore un petit peu, avant de prendre une décision ?

[échange de regards, Castella lui tend sa lettre, l’employé l’accepte] – Fin, 3’09

 

 

Relevé des temps et modes verbaux :

INDICATIF
 
Présent
Ça va / qu’on travaille / vous êtes absent… / on ne peut pas travailler / c’est un fait / vous avez autre chose à me dire / je me souviens / vous voulez partir / je ne fais pas partie de / vous dites que je parle /
Imparfait
je voulais vous donner ça (valeur de politesse, distance du passé) /
je m’en rendais pas compte / c’était vous qui me méprisiez /
Passé composé
Ils sont partis / ils ont attendu / j’ai pris rdv /
Vous avez progressé /
J’ai retourné le problème / j’ai pas trouvé /
Vous m’avez jugé / on m’a éduqué comme ça / j’ai essayé… j’ai fait…
J’ai réfléchi / je vous ai parlé /
Futur
Je serai à l’heure demain /
Conditionnel présent
Les efforts que je pourrais faire
 
 
SUBJONCTIF
 
Présent
Il faut que chacun prenne ses responsabilités / quels que soient les efforts / que je m’en aille / que vous partiez /
 
 
INFINITIF
 
présent
Sans parler de ce contrat / je commence à en avoir plein le cul / qu’il faut vous croire le roi / il faut y être / il faut pas traiter les gens / il faut arrêter / vous avez autre chose à me dire
Compl. Circonstanciels : pour me faire accepter / pour vous plaire /
/ il faut se rendre à l’évidence  /
réfléchir un peu / y penser encore / avant de prendre une décision
 
 
IMPERATIF
 
présent
Vous inquiétez pas (s’inquiéter) /

 

On peut relever les constructions (nombreuses)

-          avec [semi-auxiliaire (modal ou aspectuel)]+[relative] :

o   modaux

On a l’impression que tout vous ennuie. (indicatif présent)

On ne peut pas travailler dans ces conditions.

Je ne peux pas tout faire moi-même.

Vous vous souvenez que c’est [à] dix heures précise ? (indicatif présent)

Vous avez autre chose à me dire ? (= vous devez me dire autre chose ?)

Je crois sincèrement que je ne vous conviens pas. (indicatif présent)

Je crois malheureusement que la situation ne changera jamais (futur), quels que soient les efforts que je pourrais faire. (semi-auxiliaire au conditionnel et verbe à l’infinitif)

J’ai essayé de faire autrement

je [ne] veux pas que vous partiez. (subjonctif présent)

Vous voulez pas réfléchir un peu ? (infinitif présent)

Je croyais que c’était vous qui me méprisiez. (indicatif imparfait)

 

o   aspectuels

Je commence à en avoir plein le cul de vos grands airs là. (infinitif)

 

o   Avec verbe impersonnel (« il » ne représente personne) :

Il faut y être hein ?

Il faut pas traiter les gens de cette façon.

Il faut que chacun prenne ses responsabilités.

 [Il] Faut arrêter de me parler comme ça hein ?

C’est pas parce que vous arrivez de Paris avec vos diplômes, qu’il faut vous croire le roi du monde hein ? (se croire qqn = se prendre pour qqn)

Il faut bien se rendre à l’évidence

 

o   Ou encore avec les deux !

Je pense qu’il vaut mieux que je m’en aille.

 

Phrase difficile, à observer :

« Je crois malheureusement que la situation ne changera jamais, quels que soient les efforts que je pourrais faire. »

On pourrait dire aussi « …que je pourrai faire » (plus pessimiste) ; « …que je puisse faire » (plus incertain)… et même « …les efforts possibles » (plus rationaliste, moins impliqué personnellement, puisque le sujet disparait).

 

= Je pourrais faire des efforts. Mais quels que soient mes efforts, la situation ne changera pas, je le crains.

 

 

Tout cela doit vous rappeler le partage indicatif / subjonctif selon que l’on souhaite exprimer une certitude ou une virtualité :

 + indicatif
+ subjonctif
Je me doute que
Il me semble que
Je crois que
Je pense que
Il est certain que
Il est évident que
Je doute que
Il semble que
Je ne crois pas que
Je ne pense pas que
Il n’est pas certain que
Il n’est pas évident que
Je suis sûr que ; je sais que ; je crois que ; j’imagine que ; il parait que ;
Il semble que ; il y a des chances pour que ; il est possible que ; il se pourrait que

 

 

ACTIVITE :

« Un chirurgien aurait tenté (conditionnel passé) une greffe de jambes de kangourou sur un coureur cycliste ». Vous êtes journaliste et vous devez relater (=raconter) les réactions des personnes que vous avez interrogées.

 
Philippe (cycliste en cure de désintox)

2 comments:

  1. Salut Philippe!

    Hier un chirurgien aurait tenté une greffe de jambes de kangourou sur un coureur cycliste. Aujourd'hui, certaines personnes s'émerveillent de les possibilités de la science moderne. Les autres pensent que cette opération n'était pas juste pour le kangourou. À la fin, l'histoire décidera qui avait raison ...

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  2. Bonsoir Bojan,

    Ta production est juste (à part une inattention sur "de les" au lieu de "des"), tu as compris l’emploi du conditionnel dans son aspect hypothétique et tu l'as bien articulé aux autres temps/modes. L’idée de l’exercice était cependant de « faire parler » des témoins ou des anonymes afin d’utiliser les introducteurs de modalisation : « je trouve ça honteux, il me semble que ça devrait être interdit ! » ou « je ne crois pas que le coureur fasse des miracles avec des jambes de kangourou ».

    A jeudi ou lundi,
    Philippe

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